Origine des seigneurs de Brezons
Issus, de la famille comtale de Clermont, les Brezons furent l’une des plus anciennes et des plus prestigieuses familles chevaleresques de la Haute-Auvergne. La famille de Brezons est à l’origine de la création de la ville de Saint-Flour par la donation que firent les seigneurs de Brezons au pape de la montagne Indiciac où reposait le corps de Saint Florus, premier évêque de Lodève, depuis 389.
Les fondateurs du monastère de Saint-Flour
Contre la donation d’Indiciac à l’église voulue par Astorg II « Le Clerc » dès 980, vicomte d’Auvergne, Amblard II de Nonette dit « Le Mal Hiverné » impose son autorité sur le monastère d’Indiciac et sur les terres qui y étaient rattachés.
Entre 980 et 990, Amblard II de Nonette ordonne à Astorg III « le Taureau rouge » de reprendre Indiciac. En avril 998, sur demande d’Odilon de Mercoeur, une bulle de Grégoire V condamne cet outrage. L’année suivante, Astorg III rend la propriété à Cluny pour la reprendre à nouveau en 1008. Le Mont Indiciac est restitué à l’abbaye de Cluny en 1011.
Trouvant l’emplacement adéquat, Amblard II de Nonette fit raser la chapelle, construire une forteresse indispensable dans sa stratégie de conquête de la Planèze. Il plaça Amblard Ier de Brezons à la tête de cette nouvelle terre. Amblard fit construire la tour et la salle de Brezons qui servirent plus tard de prétoire à la justice prieurale. Commencent alors les guerres de la Planèze (v.1013-1017) où Amblard pille les églises, massacre les habitants, incendie les villages*… On raconte alors que les habitants ne firent plus de feu pour éviter la destruction de leurs biens pendant cette période particulièrement violente. Devenu riche, Amblard 1er de Brezons a mauvaise conscience. Sa femme Gatberge le persuade de consacrer un lieu à la gloire de dieu pour racheter leurs âmes.
Ainsi, Amblard a comme dessein de construire un monastère de moines cloitrés à Indiciac. Mais là encore il faut le consentement de son suzerain le comtour Amblard II de Nonette qui ne veut céder encore une fois. Le débat entre les deux Amblard est houleux : » Tu as usurpé injustement un alleu appartenant à Dieu, à l’apôtre Saint-Pierre et à l’église romaine, malgré le haut-patronage sous lequel il se trouvait. Tu as envahi son oratoire avec tes soldats, et tu leur en as distribué les richesses. Quant à moi, la détention du patrimoine d’un aussi grand patron met ma conscience en péril. Que la faute en retombe, à l’avenir à toi seul ! C’est une grande iniquité que nous soustrayions aux saints, les biens qui leur appartiennent. » La discussion ne va pas plus loin face à l’entêtement d’Amblard II de Nonette.
Mais après le viol et le meurtre supposés d’une nonne, le roi Robert II dit « le Pieux » ordonne la confiscation de sa terre d’Hauteclair et du château qui porte depuis le nom de Nonette. Il est donné à son cousin le chevalier Guillaume de Brunet. Face à cet affront, « le Mal Hiverné » tue Guillaume de Brunet. Amblard II de Nonette est excommunié par l’évêque de Clermont Begon et celui-ci interdit toutes célébrations sur toutes ses terres. Effrayé par la vindicte générale déclenchée par cet assassinat, il décide avec son petit cousin Amblard 1er de Brezons de se rendre à Rome pour racheter leurs fautes. Le souverain pontife Sylvestre II*, prévenu par l’abbé de Cluny**, Saint-Odilon, concéde de les absoudre s’ils reconstruisent le monastère, élevent une église dédiée au Saint-Sauveur et à Saint-Flour, donnent au Saint-Siège le fief d’Indiciac et font un pèlerinage à Saint-Michel. Les deux Amblard en firent la promesse devant le Pape. Mais aussitôt repartis de Rome, Amblard II de Nonette avoue qu’il ne souhaite pas tenir ses engagements, la terre d’Indiciac étant idéalement placée entre ses possessions de Rouergue (vers Rodez) et de Nonette (vers Issoire).
Méfiant, Amblard Ier de Brezons fait accélérer les travaux verse une forte somme en dédommagement à Amblard II de Nonette pour entériner la dotation rapidement et demande le soutien de Saint-Odilon pour forcer la main de son suzerain, devant le fait accompli… Amblard II de Nonette ne peut que s’incliner. La dotation est validée vers 1019 et ils jurèrent devant témoins « Et si quelqu’un de nos descendants, s’avisait de porter atteinte à notre donation qu’il soit anathème, séparé de Dieu et voué éternellement à l’enfer avec Dathan et Judas qui trahit le seigneur« . En effet, Saint-Odilon, par mesure de précaution, envoie les deux frères Astorg de Brezons et Étienne de Brezons dit « le Prévôt » au roi Robert « le Pieux » pour apposer le sceau royal à la dotation. En 1025, Saint-Odilon installe des moines de l’abbaye de Sauxillanges.
Sur le porche de l’église fut sculpté trois A qui évoquent Astorg II le Clerc, Amblard II de Nonette dit le Mal Hiverné et Amblard 1er de Brezons, les fondateurs du monastère de Saint-Flour.
Les origines présumées de la famille de Brezons
Longtemps, les historiens ont cru que les Brezons étaient issus d’un frère de Saint-Odilon de Mercoeur de la famille de Nonette : Astorg (aussi orthographié Eustorge) du fait du voisinage de leurs biens respectifs… Pas tout à fait inexacte comme déduction, puisqu’il y a bien un lien entre ces deux familles.
L’hypothèse la plus vraisemblable à ce jour est celle d’une filiation avec la famille vicomtale Clermont et avec les Nonette. Les Brezons seraient les cadets de ces deux grandes familles du pays Arverne.
Aussi Astorg II (v.890-945/962) dit Le Clerc, fondateur de la lignée de Brezons, serait le petit frère d’Armand de Nonette (v.885/890-?) et le demi-frère du vicomte Robert de Clermont (v.880- 943/948)
La généalogie des Brezons
Arsinde ou Asenderme de Brioude Velay (née vers 865/87-?) épousa Astorg de Clermont (v.855/860 – ?) avec qui elle eut un fils Robert 1er de Clermont (v. 880-936/943/948) qui lui donnera un petit-fils Robert Juvenior de Clermont (v.910-974/979) et celui-ci une arrière petite-fille, Engelberge de Clermont (v.940-985). Celle-ci épousera un cousin par alliance, petit-fils d’Arsinde de Velay, Amblard de Nonette (v.925-v.975) Comptor d’Apchon, vicomte de Nonette et de Clermont (947-962).
En effet, en secondes noces, Arsinde ou Asenderme de Brioude Velay (v. 865/875-?) épousa Armand I de Clermont (v.870-910). Elle lui donnera 5 enfants : Armand de Nonette (v.885/890-?), Astorg (v.890-mort en 945), Matfred de Thiers (né vers 880/905-927), Astorg II dit « Le clerc » et Arsinde d’Auvergne dite de Brézons Clermont (née vers 890/900) mariée à Ithier VI (né vers 911-938), sire de Mercoeur, tous les deux grand-parents de Saint-Odilon de Mercoeur.
Armand de Nonette, né de Clermont (v.885/890-?), vicomte d’Auvergne.
Amblard Ier de Nonette (v.925-v.975) épousa en 945 Foy (?-morte en 952) avec qui il aura deux fils: Amblard II de Nonette et Amblard 1er d’Apchon. Puis il se remariera avec Berthe (?) qui lui donnera une fille Arsinde. Berthe sera répudiée dès 966, date du testament d’Amblard. Il se serait marié une troisième fois avec une Ingelberge, mentionnée en 955-85.
Amblard II de Nonette (v.945/960- 1025/1030) dit « le Mal Hiverné », Baron d’Hauteclair et d’Apchon, seigneur d’Indiciac, Murol, Ussel, Chambon, Aubière et de Ravel . Longtemps contre la donation d’Indiciac à l’église, il dut céder face à la pression de sa famille, d’Odilon de Mercoeur et du pape. Il épousa Ermengarde de Chaslus et eut un fils Armand Ier d’Apchon.
Amblard 1er d’Apchon (950-998), baron d’Apchon
Astorg II d’Auvergne (v.890- v.945/962) dit « le clerc », vicomte d’Auvergne en 917 : Il était clerc libre, non engagé dans les ordres et marié à Blitiarde de Mercoeur (v.900-?). Il aura pour fils Astorg III le « Taureau rouge » (v.920/936 – 1000/1013). Particulièrement féroce dans une période on tous le monde croyait à la fin du monde, Astorg est le premier, entre 996 et 999 a avoir voulu donner la montagne d’Indiciac à Cluny pour « se faire pardonner ses crimes, tant que dure encore ce pénible voyage de la vie« . Mais sans l’aval de son suzerain Amblard II de Nonette, cette donation ne fut pas entérinée. On suppose qu’il deviendra moine à l’abbaye de Sauxillanges.
Astorg III (v.920/936-1000/1013) dit « le Taureau rouge« . Il succède à Astorg II « le clerc » et récupère la montagne d’Indiciac sur ordre d’Amblard II de Nonette, son suzerain et cousin. En avril 998, le pape Grégoire V condamne cette usurpation. Dès 999 ou 1000, Astorg rend Indiciac à l’église mais les Nonette et les Brezons ne loupent pas une occasion de reprendre la propriété ancestrale. Il se mariera à Ingelberge de Nonette (v. 955-?) fille d’Ingelberge de Clermont (v.940-982) et d’Amblard II de Nonette mariés en 952. Il auront un fils Amblard 1er de Brezons.
Amblard Ier de BREZONS (v.960-1028/1030) : Il est le premier seigneur de Brezons a porter le nom de sa terre principale. Avec sa femme Gatberge (v.960-985/997), il donna au monastère de Saint-Flour, son église de Brezons, le fief qui en dépendait et la villa de Cros. Il est le père d’Etienne dit Le prévôt. Il autorisa ses chevaliers à faire également des donations en faveur de l’église.
Étienne de Brezons (v.985-1031/1055) dit « le Prévôt« :
Veuf, Étienne se fit moine et devient prévôt en 1031 puis prieur du monastère de Saint-Flour.
Amblard II de Brezons (v.1020/1085). Il fera don de l’église de Brezons vers 1030 au monastère de Saint-Flour.
Astorg IV de Brezons (v.1025/1032-1107) aura un fils Amblard III
Amblard III de Brezons (v.1070-1107) seigneur de Brezons en 1101 et épousa Adelaide avec qui il aura un fils nommé Astorg. Amblard III de Brezons étant malade, en 1107, donna au monastère de Conques, son fils Elie, pour être moine, ainsi que l’enfant dont sa femme était enceinte, s’il naissait du sexe masculin.
Astorg V de Brezons (v.1100 -?)
Amblard IV de Brezons (1120-1204), son frère Étienne de Brezons (1115-5 avril 1194) est le 13e abbé de la Chaise Dieu en 1190. Il a été inhumé près de l’autel des Saints Confesseurs de l’Église de la Chaise-Dieu, vers le bénitier. Étienne de Brezons fit appel au Pape Célestin III pour forcer le Comte de Clermont à réparer les torts qu’il avait fait aux églises dépendantes de l’abbaye de la Chaise-Dieu.
Hugues de Brezons (v.1190-1260), chevalier seigneur de Brezons. Son frère Armand de Brezons (v.1165-1227) est le 16e abbé de la Chaise Dieu en 1203 à 1227, il reçut du Pape Honorius III trois bulles confirmant les privilèges de son monastère.
Pierre Ier de Brezons (né entre 1231/1240-1287/1304) chevalier seigneur de Brezons. Il aura une sœur Ahélis qui épousera en 1260 Faydit de la Barge (né vers 1230).
Pierre II de Brezons (né entre 1255/1260-1302) chevalier seigneur de Brezons. Il a un frère Hugues de Brezons (1265-ap 1314) et deux sœurs, Souveraine et Irlande de Brezons de Tournemire .Il épousera Marie Bréon (né vers 1250) Dame de Lugarde qui lui donnera 1 fils Guillaume, 3 filles; Éléonore, Dame de Soubrevèze, Hélis ou Alais et Adèle.
Guillaume Ier de BREZONS (né en 1282/1283-1348/1384) épousera Béatrix d’Aurillac (né vers 1290) et aura un fils Pierre. Le 18 décembre 1322, un arrêt du parlement réduit l’amende du Sire de Pierrefort à l’encontre de Guillaume 1er de Brezons, pour l’avoir attaqué avec une troupe d’hommes armés. Les deux seigneurs étaient en conflit à cause de l’érection d’un gibet.
Pierre III de BREZONS (né vers 1310-1376), chevalier haut et puissant seigneur de Brezons. Il épousera le 10 février 1348 Marguerite d’Estaing (né vers 1325). Début du conflit des Murat et des Cardaillac. Début de la guerre de 100 ans en 1337.
Guillaume II de BREZONS (né vers 1348), il épousera Dauphine de Murat (v.1350) en 1375.
Pierre IV de BREZONS (v.1370-v.1410)
A cet époque, un seigneur de Brezons (Amblard ?) fit face à la ruse de Mérigot Marchès (1360-1391) est perdit son château situé sous le rocher de la Boyle. On peut se demander si cette perte immobilière a un lien avec l’assassinat qui eut lieu en 1400 par les habitants de Lidar. Pierre de Brezons aurait-il commandité le meurtre de son frère puîné ? Le fratricide aurait servi de mobile à Reynaud de Murat alors en guerre contre les Cardaillac pour se venger du seigneur de Brezons. En effet, Pierre IV de Brezons soutenant les Cardaillac, Reynaud vint dévaster ses terres vers 1417. Ce dernier mit le feu au château de la Roche-Servière où les habitants du bourg s’étaient réfugiés.
Le château n’a jamais été reconstruit.
Bonnet Ier de BREZONS (v.1415). Son frère Guillaume de Brezons (V.1420-1432) était gouverneur de Carlat. 1453 marque la fin de la guerre de 100 ans. On sait que la reine de France, Charlotte de Savoie n’intercède pas en sa faveur lors d’un procès qui l’oppose à Pierre de Montaniat, frère d’un écuyer du roi à propos de l’archidiaconé de Billom.
Bonnet II de BREZONS (v.1470), seigneur de Brezons. il acquit le fief de Neybrousse en 1527. Bonnet assista en 1510 aux États, assemblés à Riom pour recueillir les coutumes d’Auvergne. Il eut une sœur Catherine. Son frère Antoine de Brezons, bâtard, Seigneur de Neybrousse, était Capitaine des francs-archers de Rouergue et d’Auvergne en 1490. Antoine de Brezons est mort en 1503 au service du roi. Il épousa Alix/Hélips de Langeac (v.1475) qui lui donnera deux fils Tristan de Brezons, Guillaume de Brezons de Neybrousse (v.1500) et une fille Jeanne (v.1521).
Guillaume est un fidèle de Jacques d’Armagnac, Duc de Nemours, Comte de Pardiac et de la Marche et Vicomte de Carlat, mais le trahira avant sa chute pour le roi Louis XI. En effet, il sera parmi les hommes qui assiègent Carlat en février 1476. Jugé indigne de la confiance royal, il sera tout de même accusé au procès de Nemours.
Guillaume est le premier de la branche Brezons de Neybrousse qui donnera une autre branche, celle de Brezons de Massebeau.
Tristan de BREZONS (1495-8 octobre 1534/1557), il épousera Hélène de Joyeuse le 2 février 1524 qui lui donnera un fil Charles et deux filles Hélips (v.1528) et Catherine (v.1535) de PONS de La GRANGE. En 1540 débute les guerres de religion. Guillaume de Brezons périt sur la brèche en 1557, au siége de St Quentin. Joachim de Brezons fut tué par les Huguenots près de Mende.
Charles de BREZONS (1545-1619), Capitaine gouverneur du château de Murat et Lieutenant-Général de la Haute-Auvergne qui deviendra tristement célèbre pour ses exactions contre les huguenots. Il est souvent confondu avec son cousin Louis de Brezons de Neybrousse. Il épousera, en 1558, Eléonore de Montmartin (parfois dit de Thomassin) qui lui donnera un fils François (v.1565-mort le 13 octobre 1621), dernier seigneur de Brezons et une fille Lucrèce (v.1560). Une relation extra-conjugal lui donnera un second fils Jean (V.1562). L’enfant naturel sera légitimé et anobli par lettre en 1607. La descendance de Jean se terminera avec Anne de Brezons, la fille de Jean-Jacques de Brezons, seigneur de Comolet (mort en 1716) et de Gabrielle de Murat.
1598 marque la fin des guerres de religion.
François de BREZONS (v.1565-mort le 13/10/1621), dernier seigneur de Brezons. Il épousera en premières noces Pernelle de la Rochefoucault et en seconde Marie Berthon de Crillon (v.1570). il n’aura cependant aucun descendant.
Réalisée par Sarah Hubert-Marquez
- * Sylvestre II, Gerbert d’Aurillac (né entre 945/950- mort le 12 mai 1003 à Rome)
- **Odiloon de Mercoeur (960-1049) fut abbé de Cluny dès 994.
Bibliographie :
Alfred LOUSSERT, « Les Seigneurs de Brezons » Cantal, Notes et Recueils historiques, 1994.
Joel FOUILHERON, »La Cathédrale de Saint-Flour« , Nouvelles Éditions Latines, 1966.
Pierre MOULIER, « Eglises romanes de Haute-Auvergne » Tome 3, région de Saint-Flour, Éditions Créer, 2001.
Jacques CERON, « 1095, le clair-obscur- Roman de la croisade« , chapitre « Le Mal Huverné » p.25-35, Éditions Créer, 1995.
Saint-Flour, An Mil : Naissance d’une ville dans le sang et les larmes, de Marc Duval.
le cartulaire de Saint-Flour Marcellin Boudet