William Blake, un artiste visionnaire
Article paru dans le N°1 de la revue associative Freaks Corp. en octobre 2009.
William Blake est né à Londres le 28 novembre 1757. Son père, un bonnetier, est un puritain non conformiste. Enfant, il voit dans un arbre le prophète Ezéchiel, et des anges parmi les moissonneurs. Il en parle mais son entourage le fait taire. Comme il aime dessiner on l’envoie à 10 ans dans une école de dessin du Strand. A 12 ans il compose ses premiers poèmes.
A 14 ans il entre en apprentissage chez le maître graveur Basile. Là, il apprend à manier le crayon et le burin dans un style néo-classique* même si son génie visionnaire percera. L’apprenti Blake est appelé à dessiner les sculptures ce qui laissera des traces dans son œuvre.
A 21 ans il est admis à l’Académie royale où il dessine des nus vivants. Il se lie d’amitié avec le sculpteur Flaxman et le peintre Füssli.
En 1782 il épouse Catherine Boucher une femme illettrée qui l’admire. Il l’initie à son métier. La mort de son frère Robert en 1787, sera un véritable déclenchement. Prédisposé depuis son enfance, les hallucinations se multiplient. Robert lui apparaît en rêve et lui révèle la technique de l’eau-forte**en gravure qu’il utilisera pour illustrer ses poèmes.
Sa pensée : « les choses mentales seules sont réelles »
William Blake développe vite son propre style empreint d’un mysticisme particulier. Pour lui, Dieu existe dans l’Homme. Il y a « deux états contraires de l’âme humaine » ; la créature et le créateur. Et c’est par le pouvoir de l’imagination, que l’homme peut espérer reconquérir sa divinité. L’imagination étant la seule faculté capable de se libérer de la perception sensible pour accéder à l’infini ; « Si les portes la perception étaient purifiées, le monde apparaîtrait telle qu’il est, infini*** ». Il s’agit du pouvoir visionnaire qui traverse la prison des sens pour accéder à l’infini.L’espace et le temps ne sont qu’illusions.
L’œuvre de William Blake dévoile aux hommes un monde pur qui réconcilie les contraires. L’image d’une œuvre d’art n’a de sens que si elle permet un voyage intérieur.
Il crée une cosmogonie complexe empruntée des mythes grecques, bibliques. Ainsi, la Loi qui réprime l’énergie créatrice s’incarne en Urizen asservissant le monde avec le compas de la Raison. Il a une haine pour la chrétienté traditionnelle qui maintient l’homme sous le joug du péché et paralyse sa divine énergie créatrice.
La carrière de Blake est donc en marge de ses contemporains romantiques. Même s’il valorise aussi la pensée onirique. Il est contre les formes mathématiques du néo-classicisme, préférant la « vie » de la torsion des corps. Même si Blake vénère la puissance et la pureté du dessin de Michel-Ange. Il ne supporte pas l’art mondain de Reynolds, président de la Royal Academy, et les « barbouillages » de Rubens et Rembrandt. Inventant son propre mysticisme, William Blake inspirera bon nombre d’artistes notamment Thomas Harris avec la suite d’Hannibal Lecter : « Le Dragon rouge » .
Sarah Hubert-Marquez
* Le néo-classicisme valorise la connaissance de l’Antiquité la rigueur de style et la clarté dans la composition.
** Les mots et dessins sont dessinés sur une plaque de cuivre et gravés à l’acide. Ainsi, les motifs en relief sont peints à la main, à l’aquarelle par exemple.
*** Le nom de la formation « The Doors » trouvé par Jim Morrison provient de cette citation de William Blake.